Rolls-Royce a profité de la journée du 18 octobre à Paris pour faire un premier bilan de son aventure marine dans la conception d'une gamme de navires autonomes. Le constructeur aéronautique veut révolutionner le secteur en commençant par mettre à la mer un premier navire pilotable à distance dès 2018.
Deux ans. Cela fait deux ans que Rolls-Royce communique sur sa volonté de développer des navires autonomes. Les responsables de la firme ont organisé hier à Paris un rendez-vous consacré à la presse afin d'établir un premier bilan de ses avancées dans ce domaine. L'entreprise spécialisée dans la motorisation aéronautique réaffirme sa volonté de mettre à flot son premier navire contrôlé à distance dès l'année prochaine.
Rolls-Royce veut croître sur le marché maritime
Mais le constructeur présent dans de nombreux autres domaines, notamment dans le développement de système d'instrumentalisation et de contrôle pour des réacteurs nucléaires, ne veut pas se limiter à construire ses propres navires. Il veut proposer une plateforme matérielle et logicielle afin de devenir un intégrateur des systèmes autonomes. Cela passe par la conception de systèmes standards qui permettront la conception de bâtiments modulaires.
Cette stratégie se comprend aisément. Oskar Levander, Vice Président responsable de l'innovation maritime chez Rolls-Royce prévoit une commercialisation des premiers navires contrôlés à distance en 2020, tandis que les vaisseaux pleinement autonomes débarqueront à l'horizon 2025.
Pour Rolls-Royce, il s'agit de se placer en acteur majeur du marché alors que, selon le Figaro, l'activité maritime de la société anglaise ne représente que 1,5% de son chiffre d'affaires. Pour grandir sur ce marché, il faut répondre à la demande du secteur des transports maritimes. En effet, les compagnies de Fret comptent sur les nouveautés technologiques afin de réduire les coûts d'exploitation.
Mettre en place des standards pour les systèmes autonomes
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En ce sens, Rolls-Royce travaille sur plusieurs “concept ships”. Le célèbre fabricant de voitures de luxe veut réduire de 10 à 15 % la consommation de gazole d'un porte-conteneur, puis passer progressivement à des plateformes électriques. Le coût des équipements de sécurité devrait lui aussi baisser d'environ 500 000 dollars. Il passerait de 5 millions à 4 millions de dollars dans le meilleur des cas. Pour ce faire, Rolls-Royce compte réduire le poids de ses navires et revoir le design du porte-conteneur pour augmenter la résistance au vent.
En contrepartie, la taille des équipages diminuera sur la plupart des navires de transport et de ravitaillement. Certains bâtiments n'auront plus d'humain à bord. Les membres d'équipage n'auront plus forcément les mêmes fonctions, puisqu'il s'agira de protéger les cargaisons du vol ou des intempéries, ou veiller au bon fonctionnement des systèmes à bord.
En revanche, il faut dans un premier temps construire des centres de commandes à distance. Rolls-Royce imagine un lieu bardé d'écrans dans lequel un opérateur doit scruter les environs du bateau et le conduire à bon port. Il serait aidé dans sa tâche par des outils avancés de collecte et d'analyse de données.
Dans cette optique, la firme britannique a annoncé un partenariat avec Google afin d'adapter les algorithmes de machine learning aux données maritimes en provenance des navires. L'objectif est de transmettre ce traitement des données partout dans le monde grâce au Cloud à l'opérateur et faciliter la prise de décision. Par ailleurs, les deux entreprises vont entreprendre des recherches sur l'apport de la reconnaissance vocale dans un environnement de ce type. L'analyse de données devient cruciale dès le moment que Rolls-Royce prévoit de faire du navire autonome un membre à part entière de la chaîne logistique. Les systèmes du navire seront ainsi complétés par des capteurs IoT placés sur les conteneurs, ce qui permettra d'améliorer le suivi des marchandises.
Le navire, « As a Service » ?
Une telle évolution des technologies entraîne une réorganisation du travail, mais aussi l'avènement de nouveaux modèles économiques basés sur l'apport de services. Ainsi, Rolls-Royce entrevoit la possibilité de louer la capacité de transport nécessaire à une expédition de marchandises à un tarif correspondant aux flux maritimes du moment et au temps nécessaire à la livraison. Un modèle directement emprunté à UBER et ses VTC.
Malgré toutes les bonnes volontés de la firme, le navire autonome se décline pour l'instant qu'au futur. Comme pour la voiture autonome, la législation n'est pas encore écrite. Il faut pouvoir éprouver les technologies sur le terrain, le contrôle à distance réclame de former des opérateurs, à l'instar des pilotes de drones militaires.
Aujourd'hui, quelle est la réalité du navire autonome chez Rolls-Royce ? Tout d'abord, un remorqueur bénéficiant d'un système de pilotage à distance Rolls-Royce oeuvre dans la baie de Copenhague depuis juillet 2017. Ensuite, le Fjord1, un ferry norvégien équipé d'un système de pilotage automatique conçu par le constructeur britannique desservira les fjords du Sud dès le 1er janvier 2018. La suite ? Oskar Levander évoque un projet de cargo en partenariat avec un acteur chinois. En 2020, il n'y aura donc pas des navires autonomes, mais des bâtiments contrôlés à distance. Reste à voir si l'année 2025 concrétise l'émergence du pilotage autonome.
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