Le Digital Business Forum, organisé par la firme internationale de consultants A.T Kearney se tenait cette année à Paris, au cœur du Jardin des Plantes. L'événement, centré autour de l'économie numérique, réunissait dans des débats ouverts les dirigeants des grands groupes et des représentants de start-ups. Jeremy Rifkin, l'essayiste américain et spécialiste économique ouvrait le bal sur la thématique de la montée en puissance de l'Internet of Things (IoT) et de l'arrivée d'une troisième révolution industrielle en Europe.
La troisième révolution industrielle marque l'ère d'une société à coût zéro
Dès l'ouverture du Digital Business Forum, le prestigieux événement organisé par ATKearney devient trending topic sur Twitter avec le hashtag #ATKearneyDBF. Et pour cause, l'économiste et essayiste Jérémy Rifkin ouvrait le débat en dressant un portrait de la transformation digitale en cours dans l'Union Européenne. Un balayage de cette transformation issu de son essai paru l'an dernier : « The Zero Marginal Cost Society : l'Internet des Objets, l'émergence des communaux collaboratifs et l'éclipse du capitalisme ».
Selon l'essayiste américain, nous sommes à l'aube d'une troisième révolution industrielle, car contrairement au modèle précédent qui exploite les énergies fossiles, un système de routes nationalisées et des télécommunications classiques, nous arrivons vers l'ère du « tout-internet » avec une digitalisation globale de l'économie.
Tout sera géré en amont grâce à Internet, des énergies renouvelables seront instaurées, des transports et logistiques automatisés, des voitures sans conducteur apparaîtront et diminueront le nombre de véhicules en trafic grâce à la généralisation du covoiturage. Les véhicules seront électriques, les industries produiront plus efficacement et plus vite grâce à l'impression 3D, les entreprises auront accès à des analyses en temps réel et pourront ainsi optimiser l'installation de leurs infrastructures… et des milliers d'emplois seront éliminés et remplacés par des agrégations de services fournis autour de l'économie de partage, ou dans l'installation d'énergies renouvelables pour repenser les villes en smarticities.
Et Jeremy Rifkin d'exprimer son espoir pour le futur : « J'espère qu'à partir de la moitié du 21ème siècle, si ce n'est plus tôt, une majorité des salariés dans le monde oeuvreront dans le secteur associatif et dans le non-lucratif, très occupés à faire avancer l'économie sociale et achetant la plupart de leurs biens et services dans un système de marketplace capitaliste automatisé.«
Pourquoi à coût zéro ? Parce que l'économie de partage devrait selon lui être la nouvelle norme. Des sociétés de type Airbnb, Couchsurfing, Blablacar (pour citer un acteur français), et même Uber seront monnaie courante. Il cite, chiffre à l'appui, les exemples suivants :
Les pays émergents devraient être favorisés par l'ère du tout-connecté
Toujours selon l'essayiste, les pays émergents devraient être favorisés par le recours à l'Internet des Objets et aux infrastructures conçues en fonction des nouvelles normes de l'IoT. Les villes intelligentes surgiraient en effet plus facilement sur des terrains « vierges » d'infrastructures, en tout cas davantage que lorsqu'il faut reconfigurer celles existantes. Les régions en voie de développement pourraient ainsi sauter de plein pied directement dans la Troisième Révolution Industrielle, grâce à des technologies moins chères et plus automatisées, des capteurs miniaturisés qui optimiseront la gestion des territoires et l'introduction d'énergies solaires, géothermiques et autres technologies permettant de fournir des énergies renouvelables plus simplement.
Jeremy Rifkin assure que désormais, ce sera l'exploitation de ces ressources qui va nous amener vers une société à coût zéro, tandis qu'il cite une étude de l'Université de Stanford : « Une étude sur la capacité du vent a conclu que si 20% du vent dans le monde était utilisé, cela générerait sept fois plus d'électricité que ce dont nous avons besoin aujourd'hui, et cela permettrait d'être réemployé dans notre économie mondiale. »
En bref, Jeremy Rifkin espère que nous allons utiliser des voitures autonomes, nous spécialiser dans l'économie sociale, employer des milliers de personnes pour installer les infrastructures nécessaires à la consommation d'énergies renouvelables, puis ensuite, créer des entreprises uniquement de services, tandis que nous imprimerons tous les composants dont nous avons besoin en 3D, et jouirons de l'économie de partage et des structures sociales que nous aurons créées, tandis que le monde tournera seul.
Aux sceptiques, Jeremy Rifkin répond que la Chine a déjà adopté son programme utopique
Dans un élan enthousiaste envers son oeuvre, Jeremy Rifkin conclut son intervention en précisant que si la plupart des auditeurs seront sceptiques, la Chine a déjà fait de ses propositions une réalité en Asie. En effet, en septembre 2013, l'essayiste a rencontré le Vice Premier Ministre Wang Yang pour parler de la transition Chinoise vers une troisième révolution industrielle. A la suite de cette visite, le gouvernement chinois aurait annoncé un plan de 82 milliards de dollars en quatre ans pour déployer l'énergie digitalisée en Chine. Ainsi, des millions de chinois et entreprises pourront produire leur propre énergie solaire et éolienne et la partager avec les autres. Il affirme de même que l'Europe est déjà en discussion avec l'Asie pour converger vers cette transition.
Source : Conférence ATKearney et écrits de Jeremy Rifkin : « Digital Europe, The Rise of the Internet of Things, The Ushering in of the Third Industrial Revolution and the Integration of the EU Single Market »
Image en Une : Philippe Huguen
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