Comme chaque année, depuis l'émergence de nouvelles technologies pour le grand public et pour les professionnels comme l'IoT, le Big Data et la réalité virtuelle, le marché ne cesse de croître. Des leaders commencent à s'imposer sur chaque secteur, des conflits éclatent et l'on commence réellement à se rendre compte des évolutions et des obstacles. Pour son bilan, Objetconnecte.com a choisi de se pencher sur la chute des wearables, les grandes levées de fonds, la « guerre des réseaux », l'évolution de la voiture autonome ou encore la croissance des cyberattaques.
Wearables : pauvre, pauvre Pebble
Les wearables, à qui l'on prévoyait de grands jours de gloire, ont connu une vague de perturbations cette année 2016. Rappelons-le pour les néophytes, quand on parle de wearables, on pense surtout aux trackers d'activités et aux montres connectées. L'année dernière, Fitbit allait jusqu'à tripler ses revenus et tient toujours la route aujourd'hui avec une stratégie de sortir des produits présentant peu de différence environ deux fois par an. Ce n'est pas le cas d'Apple avec son Apple Watch qui a sérieusement perdu en vitesse cette année, en baissant ses ventes de 55 % en juillet.
En effet, l'année 2016 marque une baisse de popularité conséquente des wearables auprès des consommateurs. Par exemple, 1/3 des Américains cessent d'utiliser leur montre ou leurs trackers 6 mois après l'achat à cause de ses fonctionnalités et usages limités, l'action fastidieuse de devoir le recharger, des révélations sur l'inexactitude des données recueillies ou encore la connexion au smartphone, qui est un problème majeur. On remarque cette stagnation ou chute seulement réellement cette année, puisqu'il y a trois ans, nous en étions toujours au stade de parler d'une révolution. Aujourd'hui, nous sommes face à un marché instable.
On note, par exemple, le récent rachat de Pebble par Fitbit pour quasiment rien. Pebble, l'une des sociétés qui avaient suscité l'intérêt pour les wearables en 2012, a dû annuler la sortie de ses futurs produits et retirer ses produits existants du marché. Fin 2016, Android subit également l'instabilité du marché en retardant la sortie d'Android Wear, le système d'exploitation de Google pour montres connectées, car de nombreux fabricants souhaitent arrêter d'utiliser Android avec leurs smartwatches. De plus, Motorola a également annoncé sa volonté de cesser de produire des smartwatches. Samsung, Asus et Garmin continuent leurs efforts en tentant de sortir de nouvelles montres connectées à l'approche des fêtes, mais cela ne sera sans doute pas suffisant pour remonter la pente face à Fitbit et Apple qui n'a pas dit son dernier mot.
L'autre facteur traduisant une industrie déchirée est la perte de confiance des utilisateurs. Jawbone avait attaqué Fitbit en l'accusant d'avoir violé ses brevets. Le verdict n'a pas donné Fitbit coupable. Affaire assez similaire, FitBit a également fait l'objet d'un plainte en nom collectif pour avoir fourni de fausses données sur le rythme cardiaque. Concernant les données, les principaux fabricants de trackers d'activité ont également été critiqués. Le Norwegian Consumer Council a critiqué ces fabricants en soulignant la non-information des utilisateurs. Les termes des contrats seraient obscurs et asymétriques et affecteraient le doit à la vie privée des consommateurs européens.
Ces différents facteurs font passer les wearables pour des gadgets aux yeux des consommateurs, n'y voyant ainsi plus grand intérêt. Apple a même dû s'expliquer sur le fait d'avoir développé son Apple Watch, en déclarant qu'il s'agissait d'une manière d'introduire sur futur tracker d'activité pour le fitness. On a l'impression que seul Fitbit persiste en se plaçant comme la marque ayant connu le plus grand nombre de réussites pour le moment. Il semblerait donc que le tracker d'activité pur et simple soit la formule gagnante des wearables, contrairement à la smartwatch qui contient notamment les même fonctionnalités que les smartphones.
La “guerre” des réseaux IoT commence à peine
Cette année fut le moment de l'exponentielle croissance du réseau dédié aux objets connectés : Sigfox. Ludovic le Moan et son équipe ont mené une stratégie de communication rondement menée. Tous les mois ou presque, l'annonce de la couverture ou d'un nouvel accord avec un pays tombait. Il y a quelques jours, la licorne annonçait couvrir 100 villes américaines, soit près de 20 % de la population. Présent dans une trentaine de pays, Sigfox enchaîne les contrats avec les opérateurs locaux. Cette technologie de connexion basse consommation longue portée séduit. Tout comme le modèle économique qui l'accompagne. Le faible coût par objet connecté favorise cette adoption, même si l'entreprise communique plus facilement sur les zones couvertes que sur l'adoption de sa technologie par l'industrie.
En face, l'alliance LoRa agite le drapeau de son LPWAN. En France, deux entreprises portent fièrement le sigle : Objenious et Actility. Depuis peu, le leader des opérateurs français les a rejoints. Orange a en effet lancé un hackaton en collaboration avec Objenious, filiale de Bouygues Telecom tout en commençant à couvrir le pays. Ce réseau plus jeune sur le marché a pourtant des atouts face à son concurrent principal. Le protocole permet notamment d'envoyer des messages de 50 Kbytes contre 12Kbytes pour Sigfox.
Si le profane a dû mal à voir la différence entre les deux technologies, disons que cela se joue dans l'aspect propriétaire d'un côté, contre l'ouverture de l'autre. En effet, l'Alliance LoRa prône l'installation d'un standard ouvert qui peut être adapté par tous en utilisant des fréquences libres. Seulement le fait de ne passer par un seul acteur comme Sigfox et de ne pas négocier la connexion par pays rassurent les clients. Oui, certaines fréquences libres dans un pays ne sont pas dans d'autres.
Nous avons nous-mêmes rouvert le débat en titillant quelque peu les acteurs français cités ci-dessus. Nous avouons. Cependant, le standard validé par le 3GPP en juin 2016 tend à supplanter les deux adversaires du moment. Le Narrow Band IoT ne nécessite pas d'installer de nouvelles antennes et prend une toute petite partie de la bande passante de la 4G pour faire communiquer les objets. Il fera partie intégrante du futur standard de la 5G. Cette menace qui plane au loin ne semble pas effrayer les vedettes du moment : il faudra en effet attendre au moins l'horizon 2020/2025 pour voir du changement. En attendant, Sigfox règne sur la planète réseau IoT et l'a prouvé une nouvelle fois avec une levée de fonds de 150 millions d'euros.
Levées de fonds : une année marquée par le marché français
Cette année, les entreprises IoT françaises ont attiré de nombreux investisseurs internationaux. Si l'on devait résumer cette année en ciblant les levées de fonds les plus conséquentes, les Français auraient une place de choix. En effet, selon plusieurs études, les startups françaises ont levé plus de 2 milliards d'euros en 2016, tout secteur confondu. Voici quelques une des entreprises ayant reçu des fonds qui auront une conséquence sur le marché de l'Internet des Objets.
Sigfox, qui avait déjà levé 100 millions d'euros en février 2015, clôture cette année avec une nouvelle levée de fonds record de 150 millions d'euros. L'entreprise française, apportant une connectivité basse consommation aux capteurs et objets, a fait sensation sur la scène internationale. Ces fonds lui permettront d'atteindre l'objectif d'une meilleure couverture à l'échelle mondiale et atteindre son équilibre financier en 2018. Cette levée de fonds est également importante de par le statut des investisseurs. De nouveaux acteurs américains et français se sont ajoutés aux investisseurs habituels comme Henri Seydoux, Total, Salesforce, Alto Invest, Swen CP ou encore Tamer Group. L'implication de ces deux géants dans cette récente levée de fonds montre l'influence croissante de Sigfox sur le marché de l'IoT.
La récente levée de fonds de la startup française Devialet, spécialisée dans les enceintes haut de gamme et connectées, a surpris l'ensemble de l'écosystème. Cette levée de fonds colossale de 100 millions d'euros marque le début de l'explosion du marché de l'audio connecté. Cet investissement a été marqué par des entrées au capital phares. On remarque notamment Dont Ginko Ventures, une société de capital-risque financée par le géant taïwanais Foxconn, le fabricant d'électronique Sharp et le fonds d'investissement de l'ex-ministre de la Culture et de la Communication Fleur Pellerin. L'entrée au conseil d'administration de l'entreprise de Fleur Pellerin permettra de solidifier les relations entre la French Tech et l'Asie. Cette levée de fonds pourrait permettre au français Devialet de se faire une place sur le marché mondial de l'audio haut de gamme et mettre le marché français sur le devant de la scène.
L'année 2016 a également été marquée par le marché des trackers d'activité. Jawbone, une célèbre marque de bracelets connectés et trackers d'activité, s'est fait remarquer en ayant accusé Fitbit de lui avoir subtilisé ses brevets. L'entreprise a démarré l'année sur les chapeaux de roue en clôturant une levée de fonds de 165 millions de dollars, l'une des plus grosses de l'année à une époque où le marché était en pleine effervescence. Côté investisseurs, Sequoia Capital et le fonds souverain Koweitien KIA (Kuweit Investment Authority) ont contribué au capital de Jawbone. Depuis, Jawbone a dû se séparer de certaines de ses activités car elle faisait face à une concurrence trop forte. En effet, la société a revendu sa gamme de bracelets connectés UP au rabais à un revendeur dans le but de maintenir ses comptes et peut-être développer un nouveau produit avec les fonds récoltés. Malgré l'explosion du marché au début des années 2010, la société n'a pas réussi a obtenir une part de marché assez importante pour résister face à Apple et Fitbit.
Le marché de l'interphone connecté a également reçu son lot d'investissements. On pense évidemment à la startup américaine Ring, qui avait levé 61,2 millions de dollars en mars dernier. Cette société est l'un des pionniers en matière de sécurité connectée pour les maisons. Avec Kleiner Perkins Caufield & Byers et Richard Bronson (CEO de Virgin) comme investisseurs principaux, cette récolte était accompagnée du lancement d'un tout nouveau produit, le Video Doorbell Pro, une version pro de l'ancien interphone connecté de la marque. L'objectif de ces investissements est également destiné à commercialiser la gamme de produits Ring à l'international. De nombreuses startups se sont également positionnées sur le marché de la surveillance connectée, car il s'agit des appareils les plus utilisés par les consommateurs du marché de la smart home.
Les entreprises spécialisées dans la data ont du mal à se démarquer. A la mi-décembre, l'entreprise de Big Data Databricks obtenait un nouveau financement de 60 millions de dollars. Avec ces fonds, la société a l'ambition d'incarner la prochaine évolution dans l'organisation des données, le calcul et la livraison de Big Data. Cette société, née du projet open source Apache Spark, a pour objectif de compiler de grandes quantités de données faciles à comprendre et les simplifier pour les utiliser dans la prochaine génération d'applications. Avec le développement de l'IoT, il faut avoir la capacité de stocker et gérer de grandes quantités de données pour beaucoup moins cher, ce qui est déjà le cas d'entreprises comme Facebook ou Google.
La voiture autonome, le nouveau rêve de l'industrie automobile
S'il y a bien un sujet dont nous avons entendu parler et que nous avons nous-mêmes largement traité, c'est bien celui de la voiture autonome. Une chose est sûre, le paysage industriel change à une vitesse affolante. Alors que certains constructeurs misent en ce moment même sur le véhicule connecté, la plupart des acteurs de l'automobile sont déjà dans le futur. Ils espèrent voir sur la route des voitures sans chauffeur à l'horizon 2020.
Cette année 2016 n'a pas encore été celle de la démocratisation de ce genre de véhicule, mais celle des essais en tout genre. Les autorités américaines ont reconnu l'intelligence artificielle de la Google Car début février 2016. En avril, Ford annonçait une technologie de vision nocturne pour ce type de véhicule. À la fin de ce mois, Faraday Future commençait la construction de son usine gigantesque. En mai, un premier accident mortel eut lieu. Un conducteur utilisant la fonction pilote automatique au bord d'une Tesla S est mort. L'ouverture de l'enquête en juillet par l'autorité de la sécurité routière américaine a prouvé une chose : cette technologie est loin d'être finalisée. Le 3 août dernier, la France a autorisé par décret les essais de voiture autonome dans le pays. Le but, faire de l'Hexagone “une terre d'expérimentation de la voiture autonome” comme le précise le texte publié au Journal Officiel. En ce sens, la BPI a investi plus de 7 millions d'euros dans un centre de test, mais tout reste à construire.
Finalement, ceux qui ont brillé cette année dans le pays ne sont pas ceux que l'on pense. En France, l'équipementier Valéo a marqué avec son tour de 24 heures du périphérique parisien en véhicule autonome. De leur côté, les constructeurs automobiles se sont récemment lancés dans l'aventure, à l'image de Renault dont le prototype embarquant des composants fabriqués par Valéo vient d'être testé sur route.
En effet, la multitude de capteurs, de caméras et le besoin d'intelligence artificielle notamment, demandent un apport technologique important. Nvidia est un fabricant historique de processeurs graphiques proposent ainsi des techniques de computer vision basées sur ses solutions matérielles et logiciels.
Aux Etats-Unis, L'Etat Fédéral s'est lui aussi montré favorable aux nombreux tests. L'acteur du monde du transport qui a marqué cette année n'est pas inconnu des adeptes des VTC. Le bien nommé Uber a mis ses billes (pour ne pas dire ses calos) dans la conduite autonome. La licorne a ainsi testé ses services à Pittsburgh et à San Francisco. Malheureusement, dans la ville du Golden Gate, elle vient de mettre fin à l'expérience. Uber n'a tout simplement pas respecté la législation en vigueur qui stipule le besoin d'un permis particulier. Règle que tous les autres constructeurs ont respecté. La jeune firme s'est également lancé dans le camion autonome en rachetant la startup de télématique Otto. Une première livraison a eu lieu fin octobre.
Ce bilan est globalement positif. La voiture autonome se rapproche d'une réalité tangible et agite un large écosystème dont la startup Neovia en France. Cependant, les questionnements législatifs et les problèmes de sécurité physiques et virtuels entachent cette vision d'un avenir connecté et sans conducteur.
Cybersécurité : la révélation DDoS de l'année attribuée à… Miraï !
L'année 2015 avait terminé par des piratages d'une Jeep et d'un fusil d'assaut connecté. Cette année, Tesla a dû revoir la manière de mettre à jour ses véhicules après une démonstration implacable. Ces exploits de hackers aussi impressionnants soient-ils, étaient encadrés par des chercheurs dans le domaine. Dans le courant 2016, ces derniers se sont évertués à pointer du doigt les failles de sécurité des objets connectés. Lors de la Def Con, une convention de pirates informatique ayant lieu à Las Vegas en août, les intervenants ont pu mettre à mal 23 objets connectés contenant en tout et pour tout 47 failles de sécurité. Les guides de cybersécurité publiés par des alliances prestigieuses n'y font rien. Les nouvelles normes européennes et internationales pour protéger les données des utilisateurs et la sécurité des infrastructures n'ont pas pu arrêter l'attaque massive de début octobre.
Pour certains, un seul chiffre répété trois fois suffirait à pointer du doigt le coupable : Miraï. Ce nom à consonance oriental est en fait attribué au code responsable d'une attaque de déni de service massive. Le premier touché ne fut autre que le site du consultant Brian Krebs, Krebsonsecurity. Au même moment, OVH a subi ce DDoS, un des plus massifs de l'histoire, ralentissant une partie des sites hébergés sur ses serveurs. Le code du malware Miraï permet de rassembler sur un réseau botnet des objets connectés. Plus de 150 000 caméras de surveillance connectées en IP ont servi dans cette attaque. Puis les attaquants ont rendu le code public. C'est ensuite le fournisseur de DNS DYN qui en a fait les frais bloquant les services de grands noms comme Twitter, Reddit, Airbnb et bien d'autres. Depuis, rien ne va plus sur la planète IoT.
D'un coup, le sujet de la cybersécurité qui n'était qu'évoqué lors des conférences et autres salons IoT est devenu primordial. Comme si les entreprises s'étaient rappelé d'un coup quarante ans de leçons IT concernant les principes de base de la sécurité embarquée. Plus sérieusement, les spécialistes de la sécurité ont rappelé les problèmes rencontrés avec les produits et capteurs connectés peu sécurisés. Nous en avons nous-mêmes fait l'expérience à l'IoT Expo de Grenoble, au DigiWorld de Montpellier ou encore au 10 ans de Captronic.
Nous souhaitons bien évidemment nos meilleurs vœux aux acteurs professionnels de l'Internet des Objets. Pour 2017, les résolutions sont toutes trouvées : suivre à la lettre les conseils des guides de sécurité et des experts. Sans cela, toutes les belles innovations que nous avons observées de près en 2016 seront compromises.
- Partager l'article :