Philips Lighting nous a accueillis mercredi dans son centre logistique OLAC à Miribel, près de Lyon. L'éclairage intelligent envahit cette espace de 47 000 mètres carrés.
L'entreprise néerlandaise Philips est bien connue du grand public pour ses téléviseurs et ses équipements Hi Fi. Pourtant, le commun du mortel l'oublie souvent, Philips a longtemps été l'un des leaders de l'éclairage mondial.
Cette activité est en pleine transformation. Deux facteurs sont à prendre en compte. Le premier est forcément économique : le secteur de l'éclairage traditionnel perd évidemment de l'importance avec l'émergence des technologies LED. Cependant, au sein de ce second secteur, la concurrence est rude et oblige Philips Lighting à baisser ses prix.
Cela se ressent évidemment en terme de chiffre d'affaires pour la filiale. Selon les Échos, ce pôle récemment introduit en bourse a vu son activité baissée de 4,7 % sur l'année 2016, le portant à 7,1 milliards d'euros. La maison mère effectue, elle, une redirection vers le bien-être et la santé. Pendant ce temps là, Philips Lighting, malgré une restructuration synonyme de suppression d'emploi et de délocalisation, se veut confiant pour l'année en cours.
Le second facteur intervient dans ce contexte. Dans une dynamique d'innovation, Philips Lighting mise sur la connectivité et les technologies de contrôle de l'énergie. Son centre OLAC ( pour Outdoor Lighting Application Center) est un véritable showroom international de l'éclairage connecté et intelligent. Ce lieu de démonstration est d'ailleurs unique en son genre.
OLAC : un centre unique au monde
Situé à quelques kilomètres de l'usine de Miribel dans l'Ain, cette espace de 47 000 mètres carrés et nommé OLAC a été construit il y a 20 ans, entre l'année 1996 et l'année 1997. Christian Ferouelle Ingénieur éclairagiste de Philips Lighting explique : “le site est en évolution permanente, nous changeons plusieurs fois de scénario d'éclairage par semaine.”
À cet effet, trois espaces de démonstration sont présentés aux quelque 2500 visiteurs par an. Cela paraît peu, mais le public visé est très spécifique. Christophe Bresson, Directeur de la communication France déclare :“ 5 jours par semaine nous accueillons dans ce centre des clients, des responsables des collectivités, de mairies ou encore des techniciens de l'éclairage venus du monde entier.”
Ajoutons que la capacité d'accueil par visite se limite à 35 personnes “pour des questions de réglementation” nous dit-on. Christian Ferouelle ne reste pas moins enthousiaste :
« la révolution numérique de l'éclairage est équivalente au passage de la photographie argentique au numérique”.
C'est en tout cas ce que désire nous démontrer l'ingénieur éclairagiste au cours de cette visite. Nous commençons l'expérience. Il est 18h30, la nuit vient de tomber au dessus du centre OLAC. Dans notre groupe, des membres du CETU, le centre d'études des tunnels découvrent les possibilités de l'éclairage connecté.
L'éclairage routier, un enjeu crucial pour Philips Lighting
https://www.youtube.com/watch?v=csQjA8PTl5A
La première démonstration en temps réel leur est particulièrement adressés. Nous rentrons dans un espace ressemblant fortement à une salle de cinéma. Une vitre nous sépare d'une portion 250 mètres de route, tout du moins la reproduction d'un carrefour routier limité à 90 km/heure. Derrière cette vitre, deux lampes simulent les feux de croisement d'une voiture. Au loin, nous distinguons vaguement un véhicule, des piétons et un cycliste.
Depuis un ordinateur et sa tablette, Christian Ferouelle orchestre sa présentation. Tout d'abord une vidéo de présentation explique le besoin de lumière en pleine nuit pour les automobilistes. Le but est d'éviter les accidents en offrant la meilleure visibilité possible au conducteur. De plus, cela permet de combler les problèmes de micro sommeil au volant.
Les cinq mats d'éclairage permettent de tester plusieurs configurations. Les têtes des lampadaires montent et descendent à volonté. Notre hôte nous montre les différentes teintes d'éclairage, entre les lampes à sodium et les nouvelles possibilités du LED. Petit à petit, nous voyons tous les éléments de ce décor réaliste simulé dans ce démonstrateur OLAC. On nous explique également le « le levier écologique et économique » que représente ce type d'éclairage. Christophe Bresson évoque « 40 % de réduction sur la facture et 25 % d'économie énergétique » grâce à la technologie LED.
Mais la partie la plus intéressante de cette présentation réside dans les avancées de Philips Lighting dans les technologies de l'Internet des Objets. L'ingénieur éclairagiste prend le contrôle de chaque lampe en les éteignant depuis sa tablette. Comment fait-il ? Sur la partie supérieure des lampadaires, un boîtier et une antenne connectent les dispositifs routiers en utilisant le réseau mobile. Pendant la démonstration deux minutes environ séparaient l'ordre et l'application de la commande. « Ce temps de latence est tout à fait respectable à l'échelle d'une grande ville » nous assure Christian Ferouelle.
Le choix du réseau mobile semble évident : la couverture mondiale est d'ores et déjà accomplie, ce qui permet de déployer la solution pratiquement dans toutes les villes. De plus, la puce équipant les réverbères embarque un GPS afin de géolocaliser chacun des équipements et faciliter la maintenance par les services dédiés. Cela permet aussi de faire des économies d'énergies en diminuant l'intensité ou éteignant une partie des lampes publiques connectées. Le cellulaire facilite la communication bidirectionnelle entre le centre de contrôle et le dispositif cible.
Malheureusement cela pose rapidement des problèmes de saturation réseau. Le temps de latence observé résulte de l'utilisation massive de données mobile par les mobinautes. Cependant, Philips ne cherche pas essentiellement le temps réel. La gestion des niveaux d'éclairage se réalise à la programmation suivant les calendriers de gradation et les flux de transports constatés l'année auparavant.
Une interface dédiée au cœur du système
Pour ce faire, Philips Lighting développe l'interface CityTouch. Cette dernière permet de visualiser les points lumineux connectés sur un plan ressemblant fortement à celui de Google Earth. De cette interface, les techniciens peuvent programmer ou prendre la main sur l'installation et gérer, par exemple, les niveaux d'éclairage. Ils reçoivent également des informations sur la consommation de chaque point lumineux pratiquement en temps réel. Ils peuvent augmenter l'éclairage dans une zone où un accident a eu lieu pour faciliter le travail des secours. D'autres scénarios sont déjà testés dans la ville d'Eindhoven.
Par exemple, la Police de la ville a demandé l'accès à une partie de CityTouch qui lui permet d'augmenter la puissance des lampes LED dans des zones très fréquentées. Les forces de l'ordre profitent ainsi de 30 minutes de la puissance maximales des équipements de Philips Lighting en cas d'intervention.
Dans la seconde zone de démonstration du showroom OLAC, nous découvrons la rue d'une ville de taille moyenne. Encore une fois, les éléments de décor font penser aux techniques cinématographiques.
Notre guide poursuit ses explications. Les lampadaires et les manières d'éclairer permettent des résultats hétéroclites. Pour le responsable d'une ville, nous voyons bien l'intérêt : imaginer comment il va mettre en scène l'espace urbain tout en économisant de l'énergie et donc de l'argent. La fonctionnalité la plus intéressante reste l'installation de capteurs sur les lampadaires qui adaptent la luminosité au passage d'un cycliste.
Pour l'heure, la plupart des solutions présentées dans le centre OLAC sont d'ores et déjà déployables. Pour preuve, certaines villes dans le monde sont déjà équipées des points lumineux connectés du fabricant. Parmi celles-ci, Los Angeles et Jakarta, la capitale de l'Indonésie, font figure d'exemple avec plus de 100 000 lampes « IoT ». En France, Narbonne, Caen, Le Mans, mais aussi l'île de Saint profitent de cette technologie.
D'autres applications sont évoquées, notamment le fait d'adapter l'éclairage des tunnels suivant le passage des véhicules et le moment de la journée. Autre recherche en cours, le fait d'associer la reconnaissance de l'image grâce à une caméra et les équipements de Philips Lighting pour guider les avions vers les zones de parking. Le but, à chaque fois : éclairer seulement ce qui a besoin d'être éclairé.
Le Futur : l'éclairage connecté informatif
Le troisième espace du OLAC reprend les attraits d'une place fréquentée. Ici la scénographie est particulièrement travaillée. Des projecteurs diffusent sur des toiles le passage des piétons et l'éclairage s'adapte en fonction du moment de la soirée présentée. Christian Ferouelle semble s'amuser à changer la mise en valeur du palais de justice/hôtel/opéra, le bâtiment central de cette espace.
Outre le fait de programmer les luminaires en fonction de l'ambiance voulue sur la place (sérieuse en début de soirée, festive un peu plus tard), les possibilités présentées par les images projetées nous surprennent. Au lieu de se servir du lampadaire comme une borne de relais de connexion à l'utilisateur pour envoyer des notifications vers un smartphone, les chercheurs de Philips Lighting imaginent de projeter les informations utiles à chaque utilisateur de passage. Ainsi, ils peuvent voir sur le mur en face d'eux l'heure de départ d'un train, les horaires d'un spectacle, le chemin à emprunter vers la gare et l'opéra, etc.
La connexion LiFi est également testée par le fabricant, mais l'état de l'art de cette technologie la condamne à rester dans les laboratoires de recherche. Pour l'instant, les standards actuels de connectivité suffisent à Philips Lighting pour proposer des innovations d'avenir. Mais d'abord, il faudra prouver au marché l'avantage de l'éclairage connecté dans la stratégie de la filiale. C'est en tout cas une économie de partenariat qui grandit devant nos yeux. L'entreprise néerlandaise avait présentée l'année dernière avec Vodafone une collaboration dans ce domaine.
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