J'ai embarqué dans le train du mobile à l'époque où l'iPhone 4S et le Galaxy S2 étaient les smartphones stars. J'étais chef de projet dans une agence mobile et la direction à prendre pour nos clients était simple : « On a le budget, on veut notre app mobile ! ». Cela sonnait comme une évidence si on voulait être dans le coup. Quelques années plus tard, le discours a changé.
On est passé de « Quand puis-je publier mon app ? » à « Ai-je besoin d'une app ? ». Au vu de l'investissement requis (acquisition, fidélisation, corrections… sur iOS et Android), une telle décision mérite réflexion.
81% des mobinautes ne téléchargent qu'une app mobile par semaine
La réalisation d'une app mobile n'est qu'une première étape qui mobilise une équipe fournissant d'importants efforts. Imaginez maintenant que cette app ne soit pas téléchargée et qu'elle se perde dans les bas-fonds des classements des stores, la rendant invisible aux yeux de vos potentiels utilisateurs…
Vous pouvez proposer une superbe app, si elle n'est pas téléchargée, elle n'aura aucune chance de faire ses preuves. L'objectif ici n'est pas de lister les leviers marketing pour maximiser le nombre de téléchargements mais d'expliquer le fait que la publication n'est pas une fin en soi. La phase d'acquisition nécessite un investissement financier plus ou moins conséquent. Une chose est sûre, il faut séduire vos futurs utilisateurs pour générer des téléchargements. Cette action prouvera qu'ils sont prêts à débuter une relation qu'il va falloir entretenir.
J'ai déjà vu plusieurs projets ne pas connaître le succès escompté. Dépenser plusieurs dizaines de milliers d'euros pour une app mobile et ne générer qu'une centaine de téléchargements n'est pas un cas isolé…
En moyenne, seulement 15 apps mobiles sont utilisées au cours du mois
Acquérir de nouveaux utilisateurs est une chose, les fidéliser en est une autre. Maintenant qu'ils ont accepté d'installer votre app mobile, il faut conserver leur intérêt. Il n'est pas rare de constater un écart important entre le nombre de téléchargements et le nombre d'utilisateurs réels.
Je classerais les apps mobiles en 3 cercles selon leur récurrence d'usage :
- Le premier est restreint et comprend des apps utilisées plusieurs fois par jour. Difficile de faire partie de ce cercle fermé à moins de vous appeler Facebook, WhatsApp ou Instagram.
- Le deuxième inclut des apps dont la fréquence d'usage reste importante, généralement plusieurs lancements par semaine. Vous y retrouvez par exemple Leboncoin, Waze ou L'Equipe.
- Le troisième englobe des apps avec une utilisation moindre, la fréquence d'utilisation étant plutôt mensuelle. Je peux citer Oui.sncf, Blablacar et Airbnb.
Il s'agit d'exemples qui différeront selon le mobinaute, mais vous voyez l'idée. Si entrer dans un de ces cercles semble compliqué, il faudrait peut-être y réfléchir à deux fois avant de lancer un projet d'app mobile.
J'ai collaboré avec une équipe UX pour un client spécialisé dans l'épargne salariale, avec l'objectif de générer plus de récurrence d'usage. Nous avons co-construit les grands principes de la refonte en nous orientant vers une véritable approche d'accompagnement, en fonction du profil, et avec des contenus pertinents correspondant à des moments de vie. Maintenir l'intérêt de vos utilisateurs est un challenge qui peut être relevé si vous instaurez une vraie relation.
Les mobinautes fréquentent en moyenne 51 sites web mobile par mois
On dit souvent que l'expérience utilisateur sur app mobile est meilleure que sur web app. Si vous comparez un service identique sur ces deux types d'app, vous constaterez que c'est généralement vrai ! Il existe un écart en matière de performance mais aussi en matière de possibilités fonctionnelles.
Une app mobile peut être utilisée sans réseau internet, pousser des notifications push, permettre des achats in-app… Cependant, ces fonctionnalités natives ne font peut-être pas partie de votre cahier des charges. Et les parcours de votre service ne nécessitent peut-être pas non plus des performances élevées. Sans oublier que vous avez probablement des concurrents déjà bien présents sur votre marché. En résumé, une web app peut permettre de répondre à vos exigences avec un ROI intéressant.
J'ai mené une étude pour un office de tourisme qui s'interrogeait sur la nécessité de proposer une app mobile. Au vu des attentes de la cible et du client (trouver un itinéraire, chercher un restaurant…), j'ai recommandé de ne pas réaliser d'app mobile, notamment en raison des incontournables du marché (Google Maps, TripAdvisor…) qui couvraient les besoins exprimés. J'ai préconisé de capitaliser sur le site web et les réseaux sociaux dans une logique d'acquisition et de rétention.
Le smartphone est sans conteste un point de contact privilégié pour toucher votre cible. Il faut donc penser « mobile » ! Cependant, avoir une stratégie mobile ne signifie pas forcément proposer une app mobile. Il s'agit de bien prendre en compte les problématiques d'acquisition, de fidélisation, d'expérience utilisateur et surtout de ROI pour placer le curseur au bon endroit, et privilégier le canal de distribution le plus pertinent. Les Progressive Web Apps (PWA) peuvent représenter une alternative intéressante, même si elles doivent continuer à faire leurs preuves.
Sources : Médiamétrie, App Annie
Par Eric Thean, Directeur Conseil Mobilité, SQLI
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